
« Afin d’empêcher un total déracinement ou isolement du fonctionnaire antillais, le Bumidom mit en place les congés bonifiés. Pendant les vacances d’été il se voyait offrir tous les deux ans, le billet d’avion aller-retour pour toute la famille.
Direction la Guadeloupe !
A cinq ans, endimanché comme au sortir de la messe afin d’étaler inconsciemment une relative réussite pour justifier pareil exode, pour ce second voyage en direction du Pays natal. Après 8h de vol, dès les premiers pas sur le tarmac une chaleur humide et saisissante de la nuit, venait vous faire l’accolade. Des parfums singuliers vous enflaient la narine, une foule impatiente se massait, à grand renfort de gestes et de cris, sur le toit terrasse de l’aérodrome du Raizet.
Tout murmurait en secret : « Bienvenue, bienvenue. Ici tu es chez toi ».
Comme un nouveau-né il appréhenda cet univers avec sa bouche : Il gouta toutes sortes de nouveautés, les batailles de juteuses quenettes dont les tâches sur les vêtements ne partaient pas au lavage même à 1000°, filandreuse mangues, la chair laiteuse de la pomme-cannelle,
l’acidité du maracuja, la douce amertume des prunes de Cythère, les corossols, les sapotilles, la rose, rugueuse sensualité de la goyave.



Le parfum enivrant du zeste de citron vert que les Grands mêlaient au rhum dans des liturgies aussi enthousiastes qu’incompréhensibles : « Des départs » apéritifs sans ligne d’arrivée précise.
Les flammes du piment dit bondamajack faisaient suer son père abondamment, avec sur le visage l’expression
de bien-être douloureux du suédois assoupi dans un sauna. Fendre la noix coco fraîche à l’aide du coutelas avec la précision du bretteur. Boire le victorieux breuvage, gratter à la petite cuillère la chair moelleuse au fond de la coque… Voyager à l’arrière des pick-up visage au vent l’œil alerte à guetter la furtive mangouste dans la brousse, les crabes de terre violet…
La liberté en somme… »



Après de passionnantes expériences dans l’univers de la mode et surtout un pèlerinage de quatre années à la Mecque du rhum (accessoirement du whisky) La Maison du Whisky, je reviens à la racine, le cœur (le ventre aussi) à travers ce sublime voyage que je vous propose : culture, musique, détente et plaisirs de la bouche. J’espère que vous serez touché vous aussi.
Jamin CECILE